Du 23 janvier au 24 février, Peter Grimes de Benjamin Britten était donné à l’Opéra de Paris, au palais Garnier, dans une mise en scène de Deborah Warner et sous la direction d’Alexander Soddy. Classica revient sur cette production qui n’a pas manqué d’intérêt.
Peter Grimes est affaire de personnalités. Il faut, pour incarner le pêcheur asocial toujours au bord du gouffre, déborder en tout : Vickers avant-hier, électrisant Garnier dans la sage tradition du Covent Garden d’alors, Heppner hier à l’échelle de Bastille, dans la modernité de Graham Vick, furent, pour Paris, vertigineux.
Allan Clayton leur succède en égal avec la carrure, l’échevelé, le déversement physique saisissants, et un chant dont la technique absolue permet les allègements poétiques comme les hurlements de colère. Un géant ! Maria Bengtsson, bel aigu, medium et grave inaudibles, n’a hélas pas de dimension tragique à lui opposer, Simon Keenlyside, Balstrode somptueux, si.
Le village, individus (Graham-Hall, Aldridge, Imbrailo…) et groupe choral, est de premier plan, car la production de Deborah Warner, directe, lisible, l’oppose à sa victime expiatoire avec un naturel qui n’est ni démonstration, ni parti, mais simplement évidence. La poésie de l’image d’ouverture, barque flottant dans la nuée, avec la chute de l’apprenti, dit aussitôt l’inexorable logique du malheur dont les soubresauts violents, une fois la destruction constatée, redeviendront indifférence. Magistral !
Regret, la direction d’Alexander Soddy, très précise, très – trop – élégante, ne porte pas la fosse à la déchirure absolue qu’on attend jusque dans les interludes, et qui portait à Madrid cette réussite à l’éblouissement absolu. Mais le niveau reste globalement d’exception.

Peter Grimes à l’Opéra de Paris
Crédit photo : Vincent Pontet/OnP
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➔ Pour en savoir plus sur cette production de Peter Grimes, consulter le site de l’Opéra de Paris : https://www.operadeparis.fr/saison-22-23/opera/peter-grimes