Créé à la Scala de Milan en 1868, l’opéra Mefistofele d’Arrigo Boito est donné ce mois de juin au Capitole de Toulouse. L’occasion de redécouvrir ce vaste ouvrage lyrique inspiré du Faust de Goethe, moins célèbre que son pendant français composé par Gounod.
Alors qu’on vient de découvrir la version féminine du mythe romantique avec le Fausto de Louise Bertin, quel plaisir de retrouver le trop rare Mefistofele d’Arrigo Boito ! Les dernières productions, en 2018, furent présentées à Lyon (Alex Ollé) puis à Orange (Jean-Louis Grinda). Cinq ans plus tard, ce dernier a métamorphosé sa mise en scène, mettant au premier plan le séduisant travail vidéo d’Arnaud Pottier. Un décor conque favorisant autant la stéréoscopie des images que la diffusion des voix immerge le public, visiblement heureux du spectacle, dans les nuages, perdu au cœur d’une forêt digne du Seigneur des Anneaux, ou dominé par des ogives de cathédrale. Ce flot ininterrompu sied à cette œuvre mosaïque tenant à la fois du grand opéra, du bel canto vériste, de l’oratorio et de la symphonie berlozienne.

Jean-François Borras et Nicolas Courjal.
Crédit photo : Mirco Magliocca
Toutes les forces du Capitole s’y trouvent en majesté sous l’habile direction de Francesco Angelico. L’excellence des chœurs et de la maîtrise, affutés par Gabriel Bourgoin, construit un Prologue digne de la Symphonie « des Mille » de Mahler et une fête de Pâques impeccablement calée.

Chiara Isoton.
Crédit photo : Mirco Magliocca
Distribution lumineuse, incarnations irréprochables
Depuis quelques saisons, Toulouse fait le choix des mises en scène sages et des castings raffinés, souvent hexagonaux. Jean-François Borras domine pleinement un Faust déjà bien rôdé, illuminé par un timbre constamment solaire. Chiara Isoton incarne une Margherita poignante qui développe de suaves pianissimos dans le duo « Lontano lontano ». La maturité de Béatrice Uria-Monzon sied au personnage vénéneux d’Helena à qui Marie-Ange Todorovitch donne la réplique lors de l’élégiaque barcarolle ouvrant le quatrième acte. Dans le petit rôle de Wagner, le jeune ténor vénézuélien Andres Sulbaran attire fortement l’attention. Quant à Nicolas Courjal, son Mefistofele sardonique à souhait, armé d’un médium cuivré et d’une irréprochable projection, rafle la mise. Une telle incarnation mérite qu’on lui propose désormais les rôles-titres de Wotan, de Boris, du Hollandais volant. Humble souhait de lyricophile…
Toulouse, Opéra national du Capitole, le 27 juin
Crédit photos : Mirco Magliocca
Pour en savoir plus :
- Consulter la page dédiée à la production sur le site de l’Opéra de Toulouse.
- Lire notre compte rendu sur La Gioconda donnée aux Chorégies d’Orange en août 2022 dans une mise en scène de Jea-Louis Grinda.