Nicolas Bacri reconquiert les traditions perdues et oubliées. Renouant les liens avec le passé, il nous adresse ses chants d’espérance.

Depuis longtemps, Nicolas Bacri creuse un sillon fertile. Persuadé que l’avant-garde de Darmstadt et, pour faire bref, tout ce que l’on a qualifié de « musique contemporaine » fut un phénomène propre à l’après- guerre et aux nations touchées par les nationalismes totalitaires, il s’efforce de renouer les fils d’une tradition jamais vraiment interrompue mais souvent occultée. Il s’inscrit alors dans une longue lignée : dans son Quatuor n° 9, il cite ainsi une bonne cinquantaine de compositeurs du xxe siècle, de très connus ou de très méconnus, de Schoenberg à Simpson, de Chostakovitch à Basner.
Variations et hommages
Ces trois quatuors couvrent les années 2006-2015. Le Quatuor n° 7 emprunte son titre à Mendelssohn mais le qualificatif évoque en fait la gravité d’un style contrapuntique rigoureux qui traverse sept variations fortement typées. Le Quatuor n° 8 n’est en rien un pastiche, mais ses trois parties enchaînées évoquent certains aspects de l’esthétique de Haydn, le style « all’ungarese » dans la première partie, la limpidité mélodique d’un Notturno dans la deuxième. La troisième développe sept variations (sérieuses mais brillantes voire enjouées) sur le Menuet du dernier quatuor, inachevé, de Haydn.
Le Quatuor n° 9 comprend quatre sections coulées en un seul long mouvement. Très fortement structuré, cet incontestable chef-d’œuvre est par- couru d’une tension expressive constante. Comme chez Beethoven, Chostakovitch ou Britten, la rigueur de la construction est la source de l’inspiration. Le sens du titre est parfaitement clair lorsque l’on entend la fin du quatuor, lorsque résonne ce « chant d’espérance » à la fois dense et mélodieux. Il faut dire que Nicolas Bacri a été bien servi.