Qu’il semble loin, le temps où la critique accueillait avec un sourire sardonique l’abord par un orchestre français, régional qui plus est, d’un monument comme la Symphonie n°7 de Mahler ! Seulement, en une génération, les formations hexagonales ont progressé de manière fulgurante, ce que confirme l’Orchestre national de Lille, qui fait montre d’une tenue instrumentale impeccable dans une musique dont on sait la difficulté inhumaine.
L’impulsion d’Alexandre Bloch, qui a achevé de donner une envergure internationale à un ONL longtemps conduit par Jean-Claude Casadesus, semble décisive. On peut certes considérer cette Septième trop constamment claire, et l’on cherchera en vain la métaphysique dans cette conception parfaitement brossée dans ses contours rythmiques, où les arrière-plans littéraires germaniques font défaut – le Scherzo semble même envisagé sous un angle cartoonesque, loin des jeux d’ombres mortifères et des saillies de violence expressionniste, ici plus proche de la ballade, façon Apprenti Sorcier (le petit sourire naïf des violons à 0’58). Mais pourquoi pas ? D’autant que la polyphonie, limpide, est transcendée par la prise de son, et l’élégance constante, jusque dans quelques couleurs ravéliennes – le basson, à la toute fin du Schattenhaft.

GUSTAV
MAHLER
(1860-1911)
Symphonie n°7
Orchestre national de Lille,
dir. Alexandre Bloch
Alpha 592. 2019. 1h14