Hahn à l’honneur

Il manquait à la bibliographie de Reynaldo Hahn (1874-1947) un ouvrage solidement documenté. En 2016, les actes du colloque « Reynaldo Hahn, un éclectique en musique », déjà dirigé par Philippe Blay, musicologue et conservateur en chef à la Bibliothèque nationale de France, avaient tout de même permis de mieux cerner son importance. Hahn n’est plus seulement le « compositeur de la Belle Époque », l’ami de Proust, ni l’auteur de Ciboulette et de Si mes vers avaient des ailes. Depuis deux décennies, on a commencé à explorer sérieusement son œuvre et l’on s’est aperçu que l’on tenait là un compositeur notable.

Certes, ce n’était pas vraiment un progressiste. À peu près seul de sa génération, il était attaché à la ligne claire et appréciait Saint-Saëns, Massenet, et par-dessus tout Mozart, mais il n’en était pas moins doué d’une forte originalité qu’il manifesta sur tous les fronts et dans tous les genres. Philippe Blay analyse cette importante production et brosse le portrait d’un homme multiple. La connaissance des journaux et de la correspondance du compositeur permet de se faire une idée plus précise de ce personnage complexe et plein d’avenir qui poursuivit le rêve d’un classicisme français intemporel. Un ouvrage capital.

Reynaldo Hahn, Philippe Blay, Fayard, 712 p., 28 €.

Que sa montagne est belle

« Compositeur non dogmatiquement assimilable à l’avant-garde postdarmstadtienne, non engagé politiquement à gauche, catholique, éclectique dans ses goûts musicaux », se souvient son ancien élève Stefano Gervasoni. Voilà qui donne envie de mieux connaître un artiste ostracisé dans les années 1970 après avoir gagné ses galons de moderne à la fin des années 1950. La traduction de ses écrits (Le Langage musical de la Renaissance à aujourd’hui) et d’entretiens, ainsi qu’une présentation développée de son œuvre, permettent de suivre le parcours du Milanais Niccolò Castiglioni (1932-1996).

Proche de Berio, il prendra ses distances avec « le fanatisme » de son temps pour mieux approcher le mystère de la création et la beauté des paysages glacés. Ce lettré de la Renaissance, contemplatif et amoureux de la montagne, égaré au xxe siècle, laisse une musique fascinante et variée, de style alternativement « limpide, joyeux et schoenberguien », à laquelle les ensembles spécialisés feraient bien de prêter une
oreille.

Niccolò Castiglioni, Un musicien en hiver, Angelo Orcalli et Laurent Feneyrou, Aedam Musicae, 432 p., 33 €.