Au cœur d’un centre de détention, À l’ombre des filles d’Étienne Comar ouvre une fenêtre sur l’extérieur, en quelques vocalises.
Luc est un chanteur à la carrière installée. Traversé par une crise de doute professionnelle et personnelle, il se met en retrait de sa vie sur scène et s’engage pour organiser des ateliers de chant dans une prison pour femmes. Il se confronte alors à la réalité carcérale : le cadre aseptisé, l’ennui des détenues, leur rapport très particulier avec l’extérieur, et leurs histoires souvent lourdes qui se dévoilent en filigrane.
Entre fiction et documentaire, ce long métrage adopte un parti pris naturaliste, renforcé par le choix de comédiennes non professionnelles mêlées à la distribution. Le réalisateur Étienne Comar (scénariste du film Des hommes et des dieux, Grand prix de Cannes en 2010, ainsi que de Mon Roi de Maïwenn en 2015) montre davantage qu’il ne raconte et développe avec sobriété un propos sur la libération par le chant. Le travail réfléchi autour de l’image assoit l’identité du film : le cadre rétréci au format 1,33 installe très habilement une gêne et une sensation d’enfermement, et le grain brut permis grâce au choix d’une pellicule argentique met particulièrement en valeur la beauté des visages, les détails de la peau et la diversité des expressions. Dans le rôle du professeur, Alex Lutz démontre sa grande capacité à s’éloigner de la comédie pour des rôles plus intérieurs ; Agnès Jaoui quant à elle campe une détenue sombre et mystérieuse, qui nous fait oublier l’actrice que l’on connaît. Sans lyrisme ni posture.
À l’ombre des filles est sorti en salles le 13 avril.

Crédit photo : Charles Paulicevich