Les Voice Messengers n’ont jamais été si nostalgiques, Louise Jallu fait, elle, carrément renaître Astor Piazzolla, tandis que Blossom Dearie nous off re un bain de jouvence.

Quelle joie de retrouver les Voice Messengers ! Ce nouvel album est probablement le plus nostalgique que ce groupe ait enregistré. Tout d’abord parce qu’il incarne un hommage bienvenu à son fondateur, Thierry Lalo, disparu il y a bientôt trois ans. Ensuite parce qu’il se souvient de Mimi Perrin à laquelle est consacré un émouvant et beau medley. Enfin parce qu’il n’est pas donné à n’importe quelle formation de mettre en musique Vous ne saurez jamais, une poésie de Marguerite Yourcenar, de renouveler la chanson du film Casablanca, As Time Goes By, sous le titre Comme le temps passe. On l’aura compris : ces six chanteurs et chanteuses, leurs onze invités, servis par une rythmique impeccable, s’ils chantent le temps qui passe et les jours enfuis, montrent à quel point le temps est précieux et combien ils savent le rendre émouvant et riche le temps d’un disque (Voice Messengers. « Comme le temps passe ». Black and Blue/Socadisc. 57’. 3448961108521. CHOC).

Le bandonéon, qui n’est pas assez souvent sollicité, a connu un maître au XXe siècle : Astor Piazzolla. Certaines de ses compositions lui ont permis d’acquérir une renommée mondiale, telles Libertango, Oblivion ou Soledad. Louise Jallu reprend le flambeau avec cet album judicieusement intitulé « Piazzolla 2021 ». Onze thèmes composés ou arrangés par Piazzolla permettent ainsi de retrouver la flamme et le cantabile du prodigieux argentin. Le compliment à faire à l’écoute de ce disque est simple mais assez considérable : en aveugle, on doute que la mort ait fauché le maître de Buenos Aires tant Louise Jallu fait preuve d’une maîtrise et d’un engagement tout à fait exceptionnels (Louise Jallu. « Piazzolla 2021 ». Klarthe/Pias. 59’. 5051083164276. CHOC).

Blossom Dearie (1924-2009) est un cas à part dans l’histoire du jazz vocal. Sa voix si particulière, que l’on croirait enfantine, la fit souvent considérer comme une curiosité, quelque chose comme un accident parfois charmant mais très secondaire. L’injustice est flagrante. Avec ce coffret de trois CD retraçant ses enregistrements de 1952 à 1959, il faut concéder que ces préventions sont infondées. D’abord parce que c’est une pianiste de très bon niveau, ensuite parce que sa diction et sa justesse sont irréprochables, enfin parce que la fraîcheur constante de sa voix confère à des standards rebattus une vivacité, une candeur et un naturel souvent absents chez des chanteuses plus reconnues. Blossom Dearie, c’est un bain de jouvence offert par une grande professionnelle amicale et charmeuse (Blossom Dearie. « Little Jazz Bird ». Frémeaux/Socadisc. 2 h 27. 3561302578026. CHOC).