Chaque année, pendant plus d’un mois, le piano donne le tempo à Pontoise et sa région. D’abord par un festival original, qui s’est terminé hier soir, puis par un concours, qui commence aujourd’hui.

Avec virtuosité, Piano Campus réussit à conjuguer découverte et excellence, jeunesse et expérience. Comme dans toute aventure artistique, il y a au départ un projet, une volonté, une histoire, une rencontre. Philippe Houillon, alors député-maire de Pontoise, fait appel à Pascal Escande, musicien de formation déjà distingué en fondant le festival d’Auvers-sur-Oise en 1981. Il crée alors en 2002 le Mois du piano qui installe un festival et un concours dans la ville de Pontoise et la communauté d’agglomération de Cergy-Pontoise. Rebaptisée Piano Campus dix ans plus tard, la manifestation annonce ainsi sa double vocation : porter la voix du piano, bien sûr, mais aussi l’apporter aux jeunes, aux étudiants, donc impliquer le Conservatoire à Rayonnement Régional de Cergy-Pontoise et, plus largement, l’approcher d’un public pas toujours familier de ce répertoire. « Faire découvrir le concert à un large public », résume Pascal Escande. Et d’ajouter : « Certains assistent pour la première fois à un récital de piano ».

Le rendez-vous des jeunes artistes

L’entrée libre sera alors le sésame de ce nouveau public. Sésame pour découvrir des artistes, certes jeunes mais de tout premier ordre, dont le nom commence à circuler : Nour Ayadi, déjà passée par de grandes salles, bientôt mobilisée pour son deuxième disque et par ailleurs diplômée de Sciences Po Paris (!), Tom Carré, qui vient d’enregistrer son premier disque (Ravel), Diego Rodriguez Hart, un des lauréats du concours 2022, ou Gabriel Durliat, premier Français à recevoir le premier prix du concours Piano Campus, le Campus d’or (« Il nous a beaucoup impressionnés », se souvient Pascal Escande), invité par de nombreux festivals et repéré par ses aînés, comme Philippe Cassard (« Un formidable musicien à suivre »). Piano Campus n’affiche pas de stars mais signale les grands de demain et, à chaque édition, propose une vingtaine de rendez-vous autour du piano à travers des concerts, des masterclasses et des rencontres dans une bonne dizaine de communes.
L’activité pédagogique se décline également de diverses façons, autant par de salutaires BAF’s (Bouffées d’Art Frais, tremplins pour les jeunes amateurs) que par une entreprise de sensibilisation en milieu scolaire, écoles primaires et lycées où sont en plus distribuées des centaines de CD, témoignages de l’art des lauréats.

Un concours au jury prestigieux, ouvert au monde entier

Soutenu par la ville de Pontoise, la communauté d’agglomération de Cergy-Pontoise, le département du Val-d’Oise et la région Île-de-France, en partenariat avec Yamaha qui met des instruments à disposition, Piano Campus organise aussi un concours ouvert aux candidats de 16 à 25 ans. « Nous en sélectionnons douze, pas plus, explique Pascal Escande, et prenons tout en charge, du voyage à l’hébergement et aux repas. » Selon les années, les demandes peuvent osciller entre cinquante et cent, issues du monde entier. Le jury, constitué d’une douzaine de professionnels, pianistes, bien sûr, mais aussi directeurs de festivals, enseignants (Cergy-Pontoise, Puteaux, CNSMD), critiques musicaux (dont notre collègue Michel Le Naour), est appelé à exprimer ses choix par un système électronique « pour éviter les discussions ». Cette année, le jury est présidé par Dmitri Alexeev, remarqué par de nombreux prix à la fin des années 1960 et au début des années 1970, et riche d’une fort belle discographie, notamment d’une superbe intégrale de la musique de Scriabine. Cette vingt-et-unième édition peut être suivie en direct sur la page Facebook et YouTube de l’événement.

Des épreuves exigeantes récompensées par différents prix

Lors de la demi-finale, qui se tient ce vendredi au CRR de Cergy-Pontoise, chaque candidat propose son programme « conçu comme un mini-récital » précise Pascal Escande. Une demi-heure maximum et quatre pièces, dont trois piochées dans les répertoires des XVIIIe, XIXe et XXe siècles, et une imposée, cette année l’Étude-Tableau op. 39 n° 2 de Rachmaninov : « Cela permet de révéler très vite la personnalité de chacun. »
Trois candidats seront retenus pour la finale, dimanche au théâtre des Louvrais à Pontoise, avec orchestre, sous la baguette de Benoît Girault, directeur du CRR : au programme le Concerto pour piano n° 4 de Beethoven et Le Chant de Lilith de la jeune Élise Bertrand, brillante musicienne, violoniste et compositrice, dont l’univers poétique peut être révélé par un disque récemment paru (« Lettera amorosa »). Après délibérations, les douze membres du jury décerneront les différents prix dont les prix Piano Campus, Or (5 000 € et 200 CD), Argent (4 000 €) et Bronze (3 000 €) ainsi que de nombreux prix spéciaux et autres distinctions dont le prix Classica.
« Piano Campus est né grâce à Pontoise, rappelle Pascal Escande. Nous travaillons en bonne intelligence avec la communauté d’agglomération. Le CRR constitue un centre névralgique puisqu’il nous prête une quinzaine de salles et certains de ses professeurs font partie du jury. » L’événement s’inscrit ainsi, par son action dynamique en faveur des jeunes, dans une zone déjà forte de son pôle universitaire. Et y ajoute un autre campus de haut niveau.

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➔ Pour en savoir plus sur Piano Campus, consulter le site officiel de l’événement : https://www.piano-campus.com/