Étoile à 22 ans, dans une génération miraculeuse portée à son acmé par Rudolf Noureev, patron de la danse dans la Grande Boutique des années 1980. « Un génie monstrueux », lance la danseuse qui fut, en 1992, du fastueux et dernier coup d’éclat du chorégraphe : une Bayadère pour laquelle Noureev, pourtant déjà affaibli, avait fait le voyage jusqu’à Saint-Pétersbourg pour retrouver la partition originale de Minkus.

« Seize ans à la barre » – mais plus que jamais il en aura fallu, de la souplesse et de l’agilité, pour diriger la mythique École de danse de l’Opéra de Paris au temps de la Covid-19. « Douloureuse privation de liberté », confiait ici Élisabeth Platel le mois dernier : « À cause de la pandémie, nombre de compagnies vont mettre la clé sous la porte et beaucoup de jeunes danseurs vont se retrouver sans travail. » Et dans un univers où l’excellence fait œuvre obligée de rude sélection, la directrice l’avoue sans détours : « Oui, nous formons trop de danseurs. » Elle a été l’idole absolue de notre jeunesse, Mademoiselle Platel – « icône de la ballerine », comme le souligne Dominique Simonnet.

Le soir de la première, au palais Garnier, Platel dansait Gamzatti, aux côtés du Solor de Laurent Hilaire et d’Isabelle Maurin qui incarnait, elle, Nikiya, la bayadère… C’est à Noureev que l’on doit également cette nouvelle tradition, au Ballet de l’Opéra, de nommer les étoiles sur scène, à l’issue d’une représentation : quel émouvant salut lui fut adressé de loin, en cet après-midi du 13 décembre 2020 !

Derrière nos écrans, cruellement privés des vibrations de la salle mais le cœur palpitant en voyant s’avancer sur le plateau de la Bastille le nouveau patron de la maison, Alexander Neef, et sa directrice de la danse, Aurélie Dupont, on comprit vite qu’une nouvelle étoile naissait sous nos yeux. Paul Marque a 23 ans, et devant lui la promesse d’une grande carrière. Danser, comme « un acte de résistance », disait ici Élisabeth Platel. Vivement que l’on puisse retrouver le chemin de l’Opéra, au plus près des étoiles…