Oramo et l’Orchestre symphonique de la BBC nous font découvrir la compositrice Pejačević.

Dora PEJAČEVIĆ
(1885-1923)
Concerto pour piano. Symphonie
Peter Donohoe (piano), Orchestre symphonique de la BBC, dir. Sakari Oramo
Chandos CHSA5299 (SACD). 2021. 1 h 11 min
Née en 1885 à Budapest, choyée par sa famille noble croate, Dora Pejačević put enfant s’adonner sereinement à sa passion pour la littérature, le théâtre, la peinture et la musique dans le cocon protecteur de palais cossus, entourée de paysages idylliques.
L’aisance que celle-ci manifestait dans la pratique du piano et du violon incita ses parents à recruter les meilleurs professeurs de Zagreb, mais c’est en autodidacte dotée de dons prodigieux et d’une grande culture musicale qu’elle se consacra à la composition. Désireuse d’élargir son horizon intellectuel, Pejačević entreprit un voyage à travers l’Europe et rencontra des artistes aussi influents que Rilke ou Karl Kraus qui lui inspireront certains lieder.
Confrontée aux pires atrocités en tant qu’infirmière volontaire durant la Première Guerre mondiale, elle prendra définitivement ses distances vis-à-vis d’une caste aristocratique indifférente aux souffrances du monde.
Repliée dans une « transe complète d’obsession musicale » lors de ses phases créatives, Pejačević fut l’auteure d’une cinquantaine d’opus. La mort de l’artiste à 37 ans nous prive à jamais d’une seconde symphonie restée à l’état d’ébauche et d’un opéra. Première confrontation de la compositrice à l’écriture orchestrale, le Concerto pour piano est d’emblée un coup de maître. L’introduction solennelle et dramatique est imitée par un piano qui se faufile ensuite entre les entrelacs orchestraux.
Soumis à des effets de houle, le premier mouvement atteint son apogée lors d’une cadence éminemment brahmsienne. Le lumineux Adagio précède un Finale fiévreux. Le jeu puissant de Peter Donohoe reçoit le soutien parfait d’un Sakari Ormao toujours attentif. La Symphonie possède un souffle romantique et un foisonnement mélodique impressionnants. La richesse thématique trahit de multiples influences agencées au sein d’une trame dramaturgique très élaborée.
Passionnée, inquiète, méditative, cette œuvre géniale est un pur concentré d’émotions auquel la prestation enflammée du chef finlandais adjoint une ampleur mahlérienne appropriée.