Le conflit russo-ukrainien a bouleversé la scène internationale. Face à cette partition des arts et des artistes, plusieurs voix se lèvent.
Vladimir Jurowski condamne l’invasion de l’Ukraine par la Russie et le boycott culturel.
Le 23 mars, Vladimir Jurowski, directeur musical de l’Opéra d’État de Bavière, a lancé un plaidoyer international contre le conflit russo-ukrainien. Cette lettre ouverte vise notamment à contrer les boycotts à l’égard des artistes russes et biélorusses et les invite à s’abstenir de prendre publiquement position sur le sujet :
« Une telle déclaration peut nuire considérablement à la personne elle-même ainsi qu’à ses proches, amis ou collègues de travail en Russie ou en Biélorussie », ajoutant que « beaucoup se sentent actuellement pris en otages dans leur propre pays. »
Luttant contre toute discrimination, le « message universel de paix » du directeur musical a déjà été signé par plus d’une centaine d’artistes, dont le chef d’orchestre Simon Rattle et le pianiste Alexander Melnikov.

Crédit photo : Drew Kelley
L’Allemagne au diapason
Lors d’un concert de solidarité pour l’Ukraine donné le 15 mars à Berlin, Claudia Roth, ministre de la Culture allemande, a déclaré que les Allemands « n’arrêteront pas d’écouter Tchaïkovski ni de lire Tchekov ».
La ministre a pris la parole devant le public, le Deutsches Symphonie-Orchester Berlin, Alan Gilbert à sa direction, ainsi que des artistes de renoms comme la violoniste Lisa Batiashvili, le ténor Rolando Villazón, le pianiste Kirill Gerstein, le hautboïste François Leleux et le chanteur Max Raabe.
« La musique est la contradiction la plus efficace, la plus radicale à la guerre. Nous devons contredire cette folie mortelle, sans limite, aussi fort et aussi audiblement qu’il est humainement possible. Précisément parce que nous ne pouvons pas arrêter l’agresseur, parce que nous ne pouvons pas arrêter Poutine, parce que nous n’avons aucun moyen de mettre fin à cette guerre criminelle en Ukraine en ce moment, nous avons besoin de ces signes de solidarité largement audibles avec les Ukrainiens. »
« Je ne veux pas imaginer un monde sans culture russe, sans culture ukrainienne, sans notre culture et donc je m’oppose à tous ceux qui essaient de se tourner vers la culture pour l’exploiter ou la boycotter. C’est la culture qui nous rend humains. » a-t-elle ajouté.
Le festival de Baden-Baden lève une collecte de fonds pour les réfugiés
Les Berliner Philharmoniker joueront Tchaïkovski et Stravinsky au Festival de Pâques de Baden-Baden ! Leur chef, Kirill Petrenko, a par ailleurs annoncé le lancement d’une collecte de fonds destinés aux réfugiés de l’ONU dont les Berliner Philharmoniker sont les ambassadeurs depuis septembre 2021. Selon une promesse faite lors d’une conférence de presse, il y participera lui-même, à hauteur de 100.000 euros.
Avec la France, à l’unisson
Ces déclarations en Allemagne interviennent quelques jours après celle que Roselyne Bachelot, notre ministre de la Culture, prononçait en réponse aux déprogrammations en cascade qui frappent actuellement les artistes russes en Occident. Pour elle, l’isolement de la culture russe est inconcevable : « On ne va pas arrêter Moussorgski, on ne va pas arrêter Tchaïkovski, on ne va pas arrêter de jouer Tchekhov. Il y a des demandes de boycott qui ne correspondent pas à ce qu’est pour nous la culture ».
Reprogrammations à la Philharmonie de Paris
Le 22 mars, la Philharmonie de Paris présentait le programme de la saison à venir. Revenant sur quelques décisions faites en amont du conflit russo-ukrainien, des modifications ont été opérées. En ligne de mire, des invités russes réputés proches de Poutine, comme les chefs d’orchestre Valery Gerguiev et Tugan Sokhiev, le pianiste Denis Matsuev, ou encore l’Orchestre du Bolchoï.
En effet, au début du mois de mars, Olivier Mantei avait annoncé l’annulation des concerts des artistes qui « qui auront, par le passé, eu des positions en faveur du pouvoir russe actuel sans les avoir démenties depuis ».
Le directeur général affirme cependant qu’il n’y aura pas de boycott de l’ensemble des artistes russes. Aucune prise de position officielle ne leur sera par ailleurs demandée, évitant ainsi de « les mettre dans une situation délicate, voire périlleuse ».