John Neschling achève son anthologie d’Ottorino Respighi en un volet de toute beauté, au doux et élégant ramage.

Ottorino Respighi
Les Oiseaux. Danses et Airs anciens pour luth (Suites nos 1 à 3)
Orchestre philharmonique royal de Liège
dir. John Neschling
BIS-2540 (SACD). 2021
En 2008, John Neschling, petit-neveu d’Arnold Schoenberg et d’Artur Bodanzky, se lançait dans un grand cycle Respighi avec l’incontournable premier volet consacré au triptyque romain (Fontaines de Rome, Pins de Rome et Fêtes romaines), certainement pas un maillon fort en raison d’un Orchestre de São Paulo assez anonyme, remplacé dès le volet suivant par l’Orchestre philharmonique royal de Liège, bien plus coloré dans les Impressions brésiliennes et La Boutique fantasque. Suivirent Metamorphoseon et Belkis, reine de Saba, la rarissime Sinfonia drammatica, le combo Triptyque de Botticelli–Vitraux d’église (Bis, 2016, CHOC, CLASSICA n° 202) et, en 2021, les transcriptions de pièces de Bach et Rachmaninov. Pour couronner cette anthologie, le septième et dernier volet met logiquement en regard les partitions orchestrales inspirées par la musique ancienne.
Le phénix des hôtes de ces bois
Avec une douceur irréelle, Les Oiseaux, suite de 1928 paraphrasant des pièces de clavier et de luth des XVIIe et du XVIIIe siècles, dévoilent une volière aux contours flous et moelleux, aux teintes d’aquarelle.
Proche du murmure, Le Rossignol frôle l’impalpable, avec une flûte opalescente et des cordes en apesanteur, après une Colombe comme sortie d’un rêve, hautbois liquide sur poudroiements de violons dans l’aigu et ponctuations de harpe d’une délicatesse inouïe. Avec sa trompette et sa clarinette droites comme un i, ses cordes transparentes au vibrato sous contrôle et aux pointes d’acidité parfaites pour le caquetage de La Poule, l’orchestre wallon opère des prodiges. Il est transcendé par une prise de son de toute beauté, au plus près des timbres mais avec de l’espace, de la chaleur et une dynamique remarquable jusque dans les irisations oniriques du célesta.
Les trois suites (1917, 1923, 1931) à instrumentation renouvelée de Danses et Airs anciens pour luth participent d’un même hommage à la distinction aristocratique du langage musical à la confluence de la Renaissance et du baroque. La Gaillarde que Toscanini enregistrait dès 1920, la souplesse et la rêverie mélancolique de Villanelle, la gravité du florilège d’Airs de cour, l’invitation à la danse de Passo mezzo et du ballet miniature Laura soave, l’humour moqueur de Bergamasque et l’ambiguïté de la Sicilienne, de l’Aria (au centre des Cloches parisiennes) popularisées au cinéma par Terrence Malick sont d’une suprême élégance.
Pour en savoir plus :
- Retrouver cet article dans le CLASSICA n° 254, à commander en ligne ici.
- Écouter des extraits de l’album.